L’extrême droite serait-elle le phénix de la société française ? Chaque fois qu’on la croit éradiquée, la voilà qui renait de ses cendres. Il aura suffit d’un débat sur l’identité nationale, lancé au mauvais moment et sur de mauvaises bases, pour ouvrir la boîte de pandore. On disait le Front National déconfit à l’heure du départ de son chef historique ; son Congrès sera l’évènement de la rentrée 2011 et on parle même de sa présidente probable au second tour des prochaines élections présidentielles. On croyait les catholiques nostalgiques de Monseigneur Lefebvre réduits à une poignée d’hurluberlus plus pathétiques que dangereux ; ils ne cessent d’élargir le champ dans lequel ils sèment leur sinistre parole. On espérait les Blocs et Jeunesses identitaires en perte d’audience ; ils multiplient les actions provocatrices contre la prétendue islamisation de la France, fédérant des associations féministes et laïques qui ont franchi le rubicond. Au secours l’extrême droite revient ! Et avec elle les sempiternelles tentations d’alliances d’élus de la droite dite républicaine, en mal de réélection. Mais quelle est donc cette extrême droite au sein de laquelle on retrouve aussi bien des traditionalistes que des paganistes, des négationnistes que des antimusulmans, des nostalgiques de Vichy que des déçus du communisme ? Marine Le Pen suffira-t-elle à l’agréger ? C’est à l’évidence ce qu’elle s’efforce de faire en se présentant en apôtre de la laïcité, tout en comparant les musulmans à une armée d’occupation, en référence à une période de l’histoire chère à son père, dont elle affirmait pourtant il y a peu, qu’elle n’était pas la sienne. Marine Le Pen ne parviendra à ses sinistres fins que pour autant qu’on la laisse faire. Sa victoire ne serait pas seulement notre défaite mais avant tout notre faute. Le combat contre la conception du monde et de la France du Front National est l’affaire de tous.
C’est un sujet trop sérieux pour le laisser aux seuls politiques. Souvenons nous qu’en quel que lieu et en quel que temps où elle est parvenue à prendre le pouvoir, l’extrême droite n’a été pourvoyeuse que de haine, de malheur et de trahison. Le premier geste du régime de Vichy a été d’abroger la République et d’adopter des lois d’exclusion. Les nostalgiques de cette période n’hésitent pas aujourd’hui à souiller nos rues et nos stades des emblèmes et saluts de ceux qui n’aimaient pas la France. Puisque la campagne pour les élections présidentielles de 2012 est d’ores et déjà lancée, la Licra est déterminée à faire en sorte que les valeurs de la République, en ces temps malmenées, soient au centre des enjeux de cette échéance. La France, nous enseigne le préambule de la constitution, est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Tous les “ingrédients” sont là, pour permettre une vie en société paisible, respectueuse et harmonieuse. Ces “ingrédients” ne sont pas négociables. C’est cela le pacte républicain. Et c’est cela que la Licra rappellera inlassablement pour que nul n’en ignore. Car là est la clé du “vivre ensemble”. La Licra se saisira de cette clé au cours de sa Convention qui se tiendra à Bordeaux les 2 et 3 avril 2011, en travaillant sur le thème de “la richesse de la diversité dans l’unité de la République”. Elle prolongera sa réflexion à l’occasion de ses premières universités d’été les 1er, 2 et 3 juillet 2011 au Havre, en compagnie des acteurs politiques, écono – miques et associatifs de premier plan de la nation. Elle rendra public dans la foulée un manifeste de propositions concrètes et innovantes pour lutter contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations, qu’elle demandera aux candidats à la présidence ce la République d’intégrer dans leur programme. Le temps n’est plus aux incantations mais à l’action.
Chacun devra clairement prendre position, sans langue de bois ni faux-fuyant. C’est sur la clarté des engagements que les Français feront le choix de la société à laquelle ils aspirent.