Il court, il court le Zemmour. De plateaux en studios, de librairies en amphithéâtres, de Charybde en Scylla, il essaime ses outrances et distille, en bon camelot, sa marchandise hystérique. Lors de son dernier passage dans l’émission « C à Vous » sur France 5, le compteur des réclamations du CSA a explosé après ses déclarations sur les musulmans. Sa théorie selon laquelle il faudrait attribuer aux enfants nés en France « des prénoms chrétiens » a elle aussi permis à Eric Zemmour de faire le buzz. Et sa classification des Français en fonction de leur antériorité dans la place a de quoi donner la nausée.
On pourrait croire qu’Eric Zemmour est un excité narcissique qui délire pour grimper à l’audimat le long de ses obsessions. Je ne le crois pas.
Zemmour, c’est un projet politique : l’assimilation autoritaire et forcée
Derrière Eric Zemmour, il y a depuis longtemps un projet politique qui avance ses pions et s’installe progressivement dans l’opinion. Il suffit de voir le nombre croissant de livres qu’il vend pour le comprendre. Ce projet, c’est la dictature de l’assimilation. Une assimilation bonapartiste, autoritaire et forcée, fondée sur l’identité fantasmée d’une France d’Epinal figée dans des racines chrétiennes et nos ancêtres les gaulois. C’est l’abandon obligatoire de la culture originelle de l’étranger au profit de celle du pays d’adoption. C’est le Caterpillar identitaire qui écrase tout ce qui dépasse. C’est cette logique qui, ironie du sort, avait conduit Napoléon, en 1808, à décréter à l’égard des Juifs que « ne seront point admis comme noms de famille, aucun nom tiré de l’Ancien-Testament, ni aucun nom de ville ».
La stratégie des « marches »
Eric Zemmour est un débroussailleur. Il prépare le terrain depuis des lustres. Il laboure, il bêche, il bine cette terre qui ne saurait mentir et sur laquelle il compte bien faire pousser les germes de sa France rance. A force d’excès, de dérapages toujours très contrôlés, il prépare l’opinion au basculement qu’il appelle de ses vœux. Chacun de ses dégazages sauvages contribue à nous rendre Marine Le Pen sympathique et ferait passer Robert Ménard pour un dangereux gauchiste. Les rôles sont parfaitement répartis. Quand Zemmour réclame le rétablissement de la peine de mort, le Front National se contente de l’exiger uniquement pour les crimes odieux et les actes terroristes. De quoi faire régresser la France sans qu’elle s’en aperçoive, par petits pas, par petites marches, par glissements successifs, vers l’extrémisme. La petite musique de Zemmour lancine dans nos esprits. La France s’y accoutume. Un excès chasse l’autre et le précédent devient finalement acceptable. La zemmourisation des esprits est en marche. Charge à tous les républicains de le combattre pied à pied, marche après marche, pour réinventer dans notre pays une intégration qui fonctionne et une République qui renoue enfin avec sa promesse d’égalité.
Bonjour,
Je me permet de vous écrire suite à la lecture de votre texte.
Je suis d’accord avec vous mais â part dénoncer ce que peu de gens aujourd’hui entendent concrètement qu’avez à nous proposer face à la colère et la bétise?
Allons nous perdre comme d’habitude?
Comment gagner face à des sourds?
Cordialement
Pascal Motyka