Tribune publiée sur le Huffington Post
11 février-30 août 2016. Après 201 jours d’existence, exit le secrétariat d’Etat à l’égalité réelle. Il aura suffi que les ardeurs d’Emmanuel Macron déclenchent un remaniement gouvernemental pour que le jeu des chaises musicales et ministérielles ait la peau de ce qui constituait une innovation politique aujourd’hui mort-née.
« L’égalité formelle ne suffit plus »
En février, au moment de sa création, cet ovni politique suscitait tous les enthousiasmes et toutes les audaces. A Matignon, à l’époque, on ne tarissait pas d’arguments en faveur de la création de ce nouveau portefeuille : « L’égalité formelle ne suffit plus. Rattaché au Premier ministre, le secrétariat d’État d’Ericka Bareigts s’appuiera sur chaque ministère pour permettre de décloisonner et d’ouvrir une société parfois trop fermée, pour qu’elle donne sa chance à chacun. » Rien de moins. De deux choses l’une : soit l’égalité de principe est parvenue à devenir « réelle » en seulement six mois, ce qui serait une prouesse injustement passée inaperçue ; soit il s’agissait d’une décision purement décorative destinée à servir de variable d’ajustement aux fragiles équilibres internes à la composition du gouvernement. Chacun se fera son idée sur la réponse à apporter à cette question.
Personne n’avait obligé le Président de la République et le Premier Ministre à faire entrer au gouvernement de la France « l’égalité réelle ». C’était une belle idée. Certains esprits taquins avaient immédiatement moqué cette initiative dans laquelle ils voyaient une mesure cosmétique et inutile baignée par des torrents de communication. Il était donc important de faire taire les cyniques et de leur démontrer qu’il ne s’agissait ni d’une tartufferie, ni d’une inconséquence. L’avenir leur a malheureusement donné raison.
Une mauvaise nouvelle pour l’égalité
La mort subite de ce secrétariat d’Etat, sans fleurs ni couronnes, n’est pas une bonne nouvelle. Tout d’abord parce qu’elle jette le discrédit sur l’action publique et fournit à l’extrême-droite des tonnes de carburant pour s’en prendre à la vanité de la parole politique. Ensuite, parce le message à peine subliminal envoyé à nos concitoyens est limpide : qu’ils se contentent de l’égalité « formelle », pour ne pas dire de « l’égalité virtuelle » et au final de « l’égalité irréelle ».
Nos dirigeants ne semblent toujours pas avoir compris l’ampleur et le nombre des nuages qui s’amoncellent sur la République. La situation proscrit toute désinvolture et exige de la constance et de l’engagement. Pour paraphraser Robert Badinter, il est temps que la France redevienne le pays des droits de l’Homme et cesse d’être uniquement le pays « des déclarations des droits de l’Homme ».