Le 12 mars 1998, je plaidais au procès de Maurice Papon

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Cour d’Assises de BORDEAUX Audience du 12 Mars 1998

   

C’est au nom du CONSISTOIRE ISRAELITE DE FRANCE et du B’NAI B’RITH DE FRANCE que je prends la parole.

Ces Associations représentent dans ce procès les instances de la Communauté Juive de FRANCE. Mais ce n’est pas en qualité de « Juif’ qu’elles s’expriment par ma voix .

C’est en qualité de « citoyen » de ce pays.

Ce procès n’est pas, comme on l’a dit ou écrit çà et là, avec plus au moins d’arrières pensées nauséabondes, un procès voulu par les Juifs.

La Communauté Juive de FRANCE a suffisamment souffert pour ne pas souhaiter se distinguer de la Communauté Nationale.

Ce procès, comme tous les procès, a commencé par des plaintes de victimes.

Mais c’est le Ministère Public, qui représente la Société Française dans toutes ses composantes, qui s’est substitué à elles pour exercer les poursuites.

C’est Monsieur le Procureur Général qui, au nom de l’Etat Français, le vrai, requerra une peine à l’encontre de Maurice PAPON.

C’est au nom du peuple Français que vous rendrez votre verdict. Ce procès est un procès Républicain pas communautaire. 

Même si, il est vrai les victimes dont nous parlons ici depuis près de six mois, ont été triées à l’intérieur de la population uniquement parce qu’elles étaient juives.

Cela fait la spécificité du crime ; pas du procès.

Toutes les victimes de Ja folie meurtrière du régime nazi et de ses complices n’étaient pas juives mais tous les Juifs étaient victimes, a écrit Elie WIESEL.

   

6 millions de Juifs dont 1,5 million d’enfants qui ont été exterminés, anéantis, niés jusqu’à leur mort pour avoir commis le seul crime d’être nés.

Parmi eux, 75 000 Juifs de FRANCE dont 1 600 de BORDEAUX… 11 600 enfants… Cette froide énumération arithmétique donne la mesure du cataclysme.

6 millions de personnes, c’est la population de la ville de PARIS et de sa couronne.

75 000 personnes, c’est la population de la ville de LA ROCHELLE.

Imaginez la ville de PARIS, la ville de LA ROCHELLE, anéanties ; sans âme qui vive. Cela est tellement monstrueux, tellement énorme, qu’on y perd ses repaires.

Nous ne sommes plus dans le domaine de l’humain.

On ne parle plus de victimes mais de chiffres, de statistiques.

Les victimes ne sont plus des êtres humains de chair et de sang... ce sont des masses, des victimes virtuelles.

Ce ne sont même plus des morts car il n’y a aucune référence à leur vie ; on a gommé leur vie... ils n’ont jamais existé.

Il aura fallu l’admirable travail de Serge KLARSFELD  pour faire sortir ces victimes du monde du virtuel et les remettre dans le réel en leur restituant leur identité, leur histoire, leur vie.

Grâce à Serge KLARSFELD, les Juifs de FRANCE , victimes de la Shoah ne sont plus seulement une masse, mais la somme de vies uniques, de personnes qui comme vous et moi avaient un nom, un prénom, une date et un lieu de naissance, une adresse, des sentiments, des passionsbref, ce qui fait qu’un homme est homme. 

L’intégralité de la plaidoirie en PDF

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