« Faire le désert autour du représentant de la haine »

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Nous voilà au pied du mur. Le Front National a réuni plus de 7 millions de voix le 23 avril et dimanche soir il risque d’exploser son record historique.

Durant toute cette campagne d’entre-deux tours, la candidate de l’extrême-droite nous a expliqué qu’il s’agissait de faire de cette élection un référendum entre deux France, la sienne et celle d’Emmanuel Macron. Elle a voulu imposer l’idée que son projet en valait un autre. En réalité, la question n’est pas de choisir entre deux programmes qui feraient jeu égal dans le débat démocratique. La question n’est pas de savoir si les Français sont pour ou contre l’Europe, pour ou contre la Mondialisation, pour ou contre le retour aux frontières. Entrer dans cette logique, c’est valider la stratégie de normalisation de l’extrême-droite dans notre pays.

Alors oui, Marine Le Pen a raison. Dimanche, c’est bien à un référendum que nos compatriotes sont convoqués mais la question à laquelle nous devons répondre n’est pas celle qu’elle voudrait nous imposer. Dimanche, l’alternative est simple : sommes-nous pour ou contre la République !

Tout le reste n’est que renoncement et lâcheté. Dans ce contexte, il n’y a pas de place pour le vote blanc ou l’abstention. Il n’y a pas de place pour le doute, les « pudeurs de gazelles » et les dérobades. « Quand les blés sont sous la grêle », écrivait Aragon,  » fou qui fait le délicat, fou qui songe à ses querelles au cœur du commun combat ».

Ceux qui nous expliquent qu’ils refusent de choisir entre le fascisme et le capitalisme sont les « alliés objectifs » de Marine Le Pen. On sait où où conduit l’abstention quand l’essentiel est en jeu : au reniement et au déshonneur. Ceux qui refusent de choisir entre Macron et Le Pen sont les mêmes qui, en Allemagne, conservateurs ou d’extrême-gauche, avaient refusé de choisir entre les nazis et les sociaux-démocrates. Ce sont les mêmes qui, de droite comme de gauche, à Munich, en 1938, se sont abstenus d’intervenir devant les revendications des nazis et ont laissé venir les choses. Elles sont venues. On connait la suite…

Après la crise de Munich, alors que le gouvernement Daladier s’apprêtait à recevoir en grande pompe à Paris le Ministre des Affaires Etrangères du IIIe Reich, la LICA, ancêtre de la LICRA, a appelé à « faire le désert autour du représentant de la haine ». A la veille du second tour de l’élection présidentielle, j’invite, j’exhorte nos concitoyens à rester fidèles à ce mot d’ordre.

Dimanche, « faisons le désert autour du représentant de la haine ».

Je sais bien qu’on va m’expliquer que je ressasse de vieilles histoires, que cela n’intéresse plus personne, que les électeurs du Front National s’en moquent… Est-ce une raison pour nous taire ?

Si nous ne rappelons pas à nos compatriotes que Marine Le Pen est la représentante d’un parti fondé par d’anciens collabos, des traitres qui ont pris les armes contre la France en s’engageant dans la Waffen-SS, qui le fera ?

Si nous ne rappelons pas qu’il y a autour du Front National des fantômes qui, le 16 juillet 1942, entassaient au vélodrome des hommes, des femmes et des enfants, qui le fera ?

Si nous ne rappelons pas que le slogan du Front National, « La France aux Français » , était celui des ligues d’extrême droite des années 30, qui le fera ?

Si nous ne rappelons pas que le Front National a été le refuge, depuis 40 ans, de la plupart des ennemis de la République, y compris de ceux qui ont voulu assassiner De Gaulle, qui le fera ?

Si nous ne rappelons pas que les élus du Front National détiennent le record du nombre de condamnations pour racisme, antisémitisme et négationnisme, qui le fera ?

Si nous ne rappelons pas que le Front National réclame l’abrogation de toutes les lois antiracistes et veut dénoncer la Déclaration Européenne des Droits de l’Homme pour libérer la haine dans notre pays, qui le fera ?

Si nous ne rappelons pas que dans les mairies qu’il a gagnées en 2014, le FN pratique la censure, porte atteinte à la liberté de la presse, à la culture et à la liberté de création, qui le fera ?

Si nous ne rappelons pas que Marine Le Pen n’a jamais renié ni son père, ni l’histoire de son parti, dont elle a accepté l’héritage sans bénéfice d’inventaire du Front National, qui le fera ?

 « Faire le désert autour du représentant de la haine », c’est montrer son vrai visage à nos compatriotes.

Son visage, c’est celui de la violence, aux antipodes de la « France apaisée » qu’elle prétend nous vendre. Son visage, c’est celui de l’invective, de l’injure, de la calomnie et de la vitupération, qui nous a été révélé sans fard lors du débat de mercredi.  Marine Le Pen n’est pas venue à ce débat pour faire respirer la démocratie mais pour l’étouffer. Elle n’est pas venue pour débattre mais pour se battre, avec les armes les plus viles et les plus abjectes.

Son visage, c’est celui du mensonge. Toute sa campagne a reposé sur la volonté de tromper, de falsifier, de travestir. Là encore, elle s’inscrit dans la lignée de l’extrême-droite française qui repose sur des méthodes de faussaires et de mystificateurs. Elle s’inscrit aussi dans la tradition populiste qui, Donald Trump en tête, construit sa communication sur des « vérités alternatives », sur la prolifération d’impostures et d’affabulations. Cette stratégie du mensonge, qui est celle des négationnistes, a un seul but : créer la confusion, semer le doute, parasiter notre entendement.

Son visage, c’est enfin celui de l’inversion de nos valeurs. Quand l’extrême-droite prétend défendre la République, c’est pour mieux la démolir. Le Pen a déjà annoncé qu’en cas de victoire à la présidentielle et de défaite aux législatives, elle organiserait un référendum pour changer la loi électorale, introduire la proportionnelle intégrale et dans la foulée dissoudre l’Assemblée Nationale en espérant avoir une majorité trafiquée à sa main. Quand elle prétend défendre la laïcité, c’est pour en faire un instrument de stigmatisation des musulmans. Quand elle invoque « les racines chrétiennes de la France », c’est pour mieux écraser l’héritage des Lumières et de la Révolution Française.

« Faire le désert autour du représentant de la haine », c’est relever le Front Républicain que certains irresponsables ont laissé pour mort lors des élections municipales, cantonales et régionales. 

Par électoralisme et calcul politique, le Front Républicain contre l’extrême-droite a été affaibli et parfois sacrifié. Notre devoir est de le ranimer et de le faire vivre.

J’en ai assez que lorsqu’on parle de « Front Républicain » on nous renvoie au mieux à l’indifférence, au pire aux moqueries et au dédain, comme si nous n’avions rien compris. J’en ai assez d’entendre des hommes et des femmes politiques faire la fine bouche, tourner autour du pot, théoriser sur le « ni-ni », euphémiser sur le « voter contre.  J’en ai marre. Il est temps de choisir son camp . J’ai au cours de ces derniers jours refuser de signer les appels qui ne disaient pas clairement les choses. Dimanche, pour faire échec à l’extrême droite Il n’y a pas d’autre choix que le vote Macron.

Les 11 et 18 juin lors des élections législatives desquelles dépendent la couleur politique du futur gouvernement de la France, il n’y pas d’autre choix que de barrer la route du Palais-Bourbon aux héritiers de ceux qui, le 6 février 1934, voulaient y mettre le feu !

Chacun doit y prendre sa part. Pour ce qui nous concerne, nous allons soumettre à tous les candidats aux législatives la Charte Antiraciste que nous avons déjà soumise aux candidats à la présidentielle et qu’Emmanuel Macron a signée. Partout où le FN sera en position de l’emporter, le désistement doit être systématique au bénéfice du candidat le mieux placé pour battre les candidats de Marine Le Pen.

L’extrême-droite veut éteindre les Lumières et nous plonger dans la nuit. Et bien devant le retour de l’obscurantisme, nous ne nous coucherons pas.

Voilà plus d’un an qu’on nous assène chaque jour jusqu’à la nausée que le FN serait en tête du premier tour des présidentielles. Les électeurs ont démenti cette prédiction dimanche soir. Il n’y a pas de fatalité à la victoire du FN. Tout dépend de nous, de notre volonté de maintenir les digues et d’assécher l’’extrême droite jusqu’à ce qu’elle reflue.

Le 8 mai et 19 juin au matin, je veux pouvoir me regarder dans la glace et ne pas ressentir la honte d’avoir perdu sans avoir combattu.

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