Le racisme décomplexé

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Les réactions à « l’affaire Théo » sont symptomatiques de la dérive du débat public à laquelle notre pays doit faire face. En marge de ces faits odieux, la parole raciste s’est libérée et, chemin faisant, se banalise un peu plus chaque jour. Il y a évidemment eu ce représentant syndical policier expliquant que « bamboula, ça reste convenable » puis cet ancien avocat général près la cour d’Appel de Paris, ne résistant pas à l’envie de tweeter que  « bamboula », c’était, dans sa jeunesse, « un terme affectueux ». Il y a surtout, sur les réseaux sociaux, un déferlement de haine qui, sous couvert de vouloir défendre les forces de l’ordre, s’autorise au pire et à l’ignoble. 

Mais le retour d’un véritable racisme décomplexé ne date pas de ces derniers jours. Les cris de singe subis par des joueurs de football en raison de la couleur de leur peau et les bananes jetées à Christiane Taubira sont encore dans tous les esprits. Comme les propos de Nadine Morano sur la France, « pays de race blanche » et toutes les horreurs entendues lors des manifestations anti-réfugiés. Personne n’a oublié non plus comment le débat sur l’identité nationale a ouvert la boite de Pandore en offrant aux racistes de tous poils le loisir de venir se soulager sous les ors de la République. Tout le monde se souvient aussi de ces « islamo-gauchistes » – preuve supplémentaire que les extrêmes se rejoignent – qui défilaient dans Paris en ce 15 juillet 2014 en criant « mort aux Juifs » sans que cela ne suscite, en dehors de ceux visés par ces menaces, une émotion particulière dans le pays. Chacun, enfin, garde en mémoire ces panneaux qui promettaient d’envoyer « les pédés au bûcher » lors des manifestations contre le mariage pour tous. 

Depuis plusieurs années, nous assistons à une escalade raciste, antisémite, homophobe qui témoigne de la vitalité des extrémismes identitaires en France. On assiste surtout à un phénomène d’accoutumance à la faveur duquel nos concitoyens semblent s’être habitués à des mots qui n’avaient plus court et qui, il n’y avait pas si longtemps, disqualifiaient leurs auteurs et suscitaient la réprobation générale. 

Il ne faut pas se résoudre à cette surenchère dont on connaît parfaitement les mécanismes et qui constitue souvent le prélude au passage à l’acte. Dans le contexte électoral de l’année 2017, ceux qui ont une parole publique ont aussi des devoirs. Les élus, et les candidats aux élections, ont une responsabilité particulière : celle de participer à la formation de l’opinion publique. Quand ils s’expriment, ils ont de ce fait un devoir d’exemplarité dont ils ne devraient jamais se départir, au risque de créer un appel d’air qui ne fera qu’attiser la prolifération de la haine. 

La LICRA proposera dans quelques jours aux candidats aux élections présidentielles et législatives un texte inédit : une charte éthique républicaine dont la liste des signataires sera rendue publique. Elle aura pour objectif de demander à ceux qui briguent le suffrage du peuple français d’être dignes, dans leur expression publique mais aussi dans leurs actes, des valeurs gravées au fronton de nos mairies et de nos écoles et qui figurent dans notre Constitution. 

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