Insoumis ? Indigne !

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La scène se passe à l’Assemblée Nationale et est rapportée par de nombreux témoins. Le Canard Enchaîné l’a relatée dans sa dernière édition. Alors que la mission d’information sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie s’apprêtait à débuter ses travaux, le président du groupe « La France Insoumise », Jean-Luc Mélenchon s’est ainsi exprimé devant ses collègues : « Moi, je ne m’assieds pas à côté de ce nazi » en désignant Manuel Valls, accusé d’avoir le matin même à la radio dénoncé les tenants de « l’islamo-gauchisme ».

 

L’écrivain et résistant Francis Ponge écrivait en 1965 que  « la meilleure façon de servir la République est de donner force et tenue au langage ». En assimilant Manuel Valls au régime nazi, organisation criminelle, totalitaire, raciste et antisémite, Jean-Luc Mélenchon vient, en plus de se déconsidérer gravement, de desservir  la République. Que le leader de la France Insoumise soit en désaccord avec la politique menée par l’ancien Premier Ministre est chose légitime dans une démocratie qui se respecte. Que les deux gauches incarnées par l’un et par l’autre soient devenues, pour utiliser une formule désormais consacrée, « irréconciliables » appartient à la libre respiration républicaine de forces politiques qui divergent et se combattent sur le terrain des idées. C’est la vie politique. 

 

Mais le recours à l’injure, à l’invective et à la haine, c’est l’inverse de tout cela. Réduire un homme comme Manuel Valls, ancré dans nos principes républicains et dans l’universalisme des Lumières, en le « nazifiant » ainsi est indigne d’un élu de la Nation. Les comparaisons de cette nature contribuent à alimenter la banalisation de mots chargés de plomb, de sang et de larmes. Un tel relativisme est dangereux. Si tout est « nazi », plus rien ne le sera et alors la haine pourra prospérer sans crainte de dénonciation devenue impossible. La responsabilité d’un homme qui a recueilli plus de 7 millions de voix sur son nom aux dernières élections présidentielles est d’avoir le courage, pour reprendre Jaurès, de ne « pas céder au mensonge triomphant qui passe », fût-ce pour flatter une partie de son électorat. 

 

Lors de la campagne pour les élections présidentielles, la LICRA a soumis à tous les candidats une Charte Antiraciste dont le premier engagement était « de s’exprimer avec le souci permanent de l’éthique républicaine, de la cohésion nationale et de la paix civile ». Jean-Luc Mélenchon ne l’a pas signée, en dépit des engagements pris par son équipe de campagne. Avec le recul et à l’aune de l’outrage qu’il vient de commettre, on comprend désormais que cette absence de signature n’était pas seulement une abstention. 

 

Par l’invective, Jean-Luc Mélenchon détourne l’attention du véritable problème à l’origine de cette algarade. Ce problème n’est pas un fantasme de Manuel Valls : c’est celui de la coagulation qui existe entre une partie de l’extrême-gauche et l’islam politique. C’est cette mauvaise pente prise par certains à mettre autant d’énergie – si ce n’est plus – à stigmatiser la police que les terroristes. C’est cette attitude qui consiste à accabler davantage les défenseurs de la laïcité que les spadassins de l’islamisme et du communautarisme. C’est ce réflexe quasi pavlovien visant à faire de notre passé colonial la source de tous nos maux plutôt que de regarder en face les idées qui ont inspiré Merah et ses funestes successeurs.

Si l’époque est à multiplier les comparaisons avec les périodes les plus sombres de notre histoire, alors j’invite Jean-Luc Mélenchon à méditer une autre analogie : celle qu’il existe entre ces « islamo-gauchistes » compatibles avec toutes les compromissions et ceux qui, devant la montée du nazisme, déployaient un luxe de précautions pour dénoncer Hitler tandis qu’ils vomissaient tous ses contempteurs. Chacun connait la fin de l’histoire. 

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1 Comment

  1. cassuto says: Répondre

    oui, c’est inadmissible en effet, mais les gens sont des moutons et ils suivent celui qui crient le plus fort, et Melanchon, s’il ne disait pas tant de bêtises est un bon « tribun », c’est tout ce que l’on peut lui reconnaître, et de ce fait, il se croit tout permis, et là est le danger

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